« Les morts réclament des prières » : Fêtes et croyances folkloriques en novembre

La frontière entre octobre et novembre marque l’enchainement de plusieurs fêtes à la mémoire des disparus. L’Halloween, célébrée le 31 octobre, est probablement la plus populaire de ces journées. Son origine remonterait à l’Écosse et l’Irlande du XVIe où les enfants étaient envoyés cogner aux portes des maisons afin de « quêter pour les âmes ». Cette tradition n’est évidemment plus la même aujourd’hui, au grand bonheur des enfants.
Deux autres fêtes appartenant au culte catholique suivent celle d’Halloween : la Toussaint et le Jour des Morts. Le 1er novembre est l’occasion de rendre hommage aux saints de l’Église grâce à la prière. Pendant longtemps, la Toussaint a été un jour férié où le travail devait faire place à la commémoration. Si ce n’est plus le cas au Québec, la France a conservé ce jour de congé.
Le 2 novembre, souvent appelé le Jour des morts, porte en réalité le nom de Commémoration de tous les fidèles défunts. Il s’agit encore une fois d’une fête catholique durant laquelle, comme son nom l’indique, on rend grâce à la mémoire des personnes décédées. Cette fête occupe une place particulière dans le folklore québécois.

(Le Monde illustré, vol. 12, no. 600, 2 novembre 1895, p. 400)
Selon Jean-Claude-Dupont et Jacques Mathieu dans leur ouvrage Héritage de la francophonie canadienne (1986), ce moment est propice aux retours sur terre des défunts. Il n’est donc pas rare de croiser spectres et fantômes durant les premiers jours de novembre. Pour se prémunir de ces mauvaises rencontres, on recommandait de ne pas sortir entre le coucher du soleil du 1er novembre et midi le jour suivant. Ce confinement ne devait pas être l’occasion de réjouissances et d’excès; au contraire, la prière était encore une fois prescrite, en particulier à l’attention des défunts.
Tous se retrouvaient à nouveau dans l’église paroissiale le 2 au matin afin de prier pour les parents et amis défunts; en effet, les prières offertes aux défunts le Jour des morts leur permettaient d’entrer au ciel
Jean-Claude Dupont et Jacques Mathieu, Héritages de la francophonie canadien, PUL, 1986, p. 54
Dupont et Mathieu rapportent plusieurs témoignages concernant ce moment de l’année. Un jeune ayant décidé de sortir en pleine veillée des morts est poursuivi par un fantôme inconnu jusqu’à pousser la jument qu’il chevauche à l’épuisement. Des meuniers tentent de moudre le grain un premier novembre, mais n’y arrivent; les outils et l’équipement se brisent sans raison apparente, si ce n’est le courroux des revenants. Un fermier dont la grange est retrouvée abattue au matin du 3 novembre y voit le geste des fantômes. Enfin, un homme entêté refuse de prier pour les morts, à moins que ceux-ci ne le demandent; en conséquence, les portes de sa maison ont claqué toute la nuit.
Si ces récits peuvent aujourd’hui prêter à sourire, ils n’en demeurent pas moins des vestiges du passé nous rappelant le rôle central de la mort dans nos existences et la manière dont les générations passées ont su développés des rituels et des croyances pour y faire face.